mercredi 28 juillet 2010

Syanne


Grâce à toi, my God, qui te presses le citron (18/08/2005) depuis cinq ans pour apporter de l’eau à notre moulin (26/09/2005), nous restons souvent baba (16/06/2006) dans cette auberge espagnole (27/05/2008). Il faut bien le dire : tu en connais un rayon (13/01/2007) et ton site vaut son pesant d’or (19/10/2005). C’est Byzance ! (20/04/2007). On est aux anges (12/09/2006), même ceux qui sont dans la lune (03/06/2006). Sabrons le champagne (10/02/2006) ! Qu’Expressio tienne le coup (24/05/2009), nous en ferons notre miel (26/03/2010).
Syanne
***
Petite nouvelle sans queue ni tête mais dans l’ordre chronologique
D’après Expressio 2005

         Les doigts dans le nez, il se regardait le nombril. « Quel ours mal léché », se dit-elle. Mais plutôt que d’en faire tout un fromage, mettant son grain de sel, elle lui proposa de se frotter le lard ensemble en lui roulant des yeux de merlan frit. Entre la poire et le fromage, un peu soupe au lait, elle le fit tomber dans les pommes à force de lui presser le citron. Tout de go, il repartit peigner la girafe – ce qui vaut mieux que de travailler pour le roi de Prusse, ou faire le mouton de Panurge. Malgré un froid de canard, elle avait le cœur qui battait la chamade : pourtant il cassait pas trois pattes à un canard, avait tendance à enculer les mouches, remettait tout à la Saint-Glinglin, et, fier comme Artaban, après avoir trempé son biscuit, lui posait souvent un lapin. Mais elle se remettait sur son trente et un, faisait l’enfant de la balle, et ça repartait comme en quarante : il filait à l’anglaise après s’être fait tailler une pipe, fier comme un pou mais vrai faux jeton et faisait la grasse matinée après avoir fait la bombe. Quelquefois, entre chien et loup, elle croyait décrocher la timbale : mais il arrivait comme les carabiniers et la payait en monnaie de singe. Autant en emporte le vent ! Elle avait beau battre la semelle, faire semblant d’avoir un polichinelle dans le tiroir, défendre son pré carré : elle faisait un four et c’était la fête à neuneu. Lui était tellement dans les vapes qu’elle l’aurait volontiers envoyé à l’abbaye de Monte-à-regret, ou par monts et par vaux, ailleurs, quoi… Car, s’il ne mettait jamais la main à la pâte, il savait bien la rouler dans la farine, mais l’habit ne fait pas le moine : c’est elle qui tentait de joindre les deux bouts pendant qu’il coinçait la bulle. Drôle de couple : il avait une araignée au plafond, elle avait les dents longues, s’imaginait toujours être le dindon de la farce et réchauffer un serpent dans son sein. Pas étonnant qu’elle soit souvent patraque ! Au lieu de toujours veiller au grain, elle aurait mieux fait de l’attendre comme les moines l’abbé, ne pas risquer de casser sa pipe en voulant monter au pinacle.

         Il continuait à mener une vie de patachon, partait parfois comme un pet sur une toile cirée, mais savait bien lui jeter de la poudre aux yeux. Allait-il finir par tuer la poule aux œufs d’or ? En attendant il menait les poules pisser : « A l’impossible nul n’est tenu », disait-il – in extenso et in extremis. C’est un secret de Polichinelle : sans faire semblant de rien, il ne la quittait pas d’une semelle et lui faisait prendre des vessies pour des lanternes quand il s’était pris une veste. Il avait le nez creux : à force d’en prendre pour son grade, sa fleur de nave, et de le voir tirer sa flemme, elle pouvait mettre flamberge au vent alors il se faisait tendre car petite pluie abat grand vent… Elle le mettait parfois sur la sellette, à brûle-pourpoint, mais, incorrigible, il bayait aux corneilles et, de but en blanc, faisait l’école buissonnière. Elle était bredouille : c’était lui, l’as ! Elle faisait chou blanc, alors qu’il avait vraiment le cul bordé de nouilles. Mais bon, elle n’en chiait pas une pendule, car elle prenait son pied avec ce cœur d’artichaut. Faut dire qu’elle était bonne poire : il se pressait le citron pour lui raconter des salades, car il était menteur comme un soutien-gorge (ça tombait à pic car elle n’en mettait pas). Il voulait le beurre et l’argent du beurre, et elle se demandait si c’était du lard ou du cochon. Quand il avait la gueule de bois, il vendait la peau de l’ours avant de l’avoir tué, et ça jetait de l’huile sur le feu. Leur lune de miel passait l’arme à gauche, et il embrassait Fanny, en tout bien tout honneur. Puis se remettait à parler à bâtons rompus, même trempé comme une soupe. Elle buvait du petit lait, et lui reprenait du poil de la bête. Mais ça ne durait pas : à nouveau il tombait sur un bec, elle le mettait à pied et pour ne pas passer sous ses fourches caudines, il regagnait ses pénates avant que ça ne tourne en eau de boudin. Il prétendait être au bout du rouleau. En fait, il se portait comme un charme et, dans un fauteuil, lui tendait un nouveau miroir aux alouettes. Avant qu’elle ne découvre le pot aux roses, et qu’il ne soit Gros-Jean comme devant, il menait sa vie de bâton de chaise, et la laissait le bec dans l’eau tout en lui devant une fière chandelle. « ça fait la rue Michel , dit-elle un jour, t’as eu les yeux plus gros que le ventre, avec tes potes qui te suivaient, à la queue leu leu. Si je t’avais pris au pied de la lettre, on aurait toujours mis la charrue avant les bœufs. Mais t’as vraiment un poil dans la main, et ça ne passe plus comme une lettre à la poste. Ma colère bat son plein et t’apportes sans cesse de l’eau à mon moulin. Il y a péril en la demeure : t’as beau être mi-figue mi-raisin, comme on fait son lit on se couche. Finis les châteaux en Espagne. Avec toi j’ai été à bonne école, et j’aimerais mieux que tu sois pédé comme un phoque. Vingt-deux ! quel cercle vicieux ! J’en ai ma claque que tu pètes plus haut que ton cul, que tu vives à tombeau ouvert. C’est bête comme chou, mais t’as mis le feu aux poudres. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase : tu te crois sorti de la cuisse de Jupiter et tu voudrais vivre comme un coq en pâte. »

         Lui faisait contre mauvaise fortune bon cœur, tirait des plans sur la comète, bottait en touche, sachant bien que sans lui elle s’ennuierait comme un rat mort. Car –si la femme de César ne doit pas être soupçonnée – il savait bien qu’elle avait le feu au cul et qu’il valait son pesant d’or. Elle en demandait et en re-demandait, à tire-larigot, et sans lui, ça serait désormais la semaine des quatre jeudis. Alors, main de fer dans un gant de velours, il lui fit du plat, la gueule enfarinée, lui disant que sans elle il filait un mauvais coton, qu’il pouvait plus être au four et au moulin, que la vie seul c’était peau de balle… bref ils redevinrent copains comme cochons et vécurent comme cul et chemise.

         Plus tard, ils tirèrent ensemble les marrons du feu, car ils n’étaient pas sortis de l’auberge. Un jour, elle voulut lui clouer le bec, mais il était dans le coltar (qu’avait-il dit ? je ne sais pas,  je donne ma langue au chat…). Toujours est-il qu’elle se retrouva dans le panier à salade, doutant fort qu’il lui apporterait des oranges tant la bouteille était à l’encre. Le jeu n’en valait plus la chandelle : vous voulez des explications ? Minute papillon ! J’y arrive : voici leur emploi du temps.
Après avoir pris le café du pauvre, ils avaient mangé sur le pouce et sur le champ, sans ménager chèvre ni chou, eurent à nouveau maille à partir. Alors, pendant qu’il coulait un bronze, elle lui prépara un bouillon de onze heures (il ne se méfierait pas, car il n’avait pas inventé l’eau tiède et avait de toute façon d’autres chats à fouetter). Son plan à elle ne bougea pas d’un iota, elle garda son sang-froid, sachant que pour lui elle comptait pour du beurre et que cette journée serait à marquer d’une pierre blanche.

         Elle lui avait dit d’aller se faire voir chez les Grecs, lui avait remis les pendules à l’heure : elle ne voulait plus tenir la chandelle, être la cinquième roue du carrosse et tout remettre aux calendes grecques. « Au temps pour moi,  avait-il répondu, tu fais la fine bouche, mais j’ai pas envie que tu fasses grève. Je ne marche pas à voile et à vapeur, crois-moi ! j’te tiendrai plus la dragée haute. Ne jette pas le bébé avec l’eau du bain, ni le manche après la cognée : je ferai plus le Jacques. Mes folies ont fait long feu. » Tant de candeur lui mit la puce à l’oreille, et elle resta droite dans ses bottes. Le croire ? Autant chercher une aiguille dans une botte de foin !  Le marchand de sable était passé, et il avait bon dos. Fallait pas pousser mémé dans les orties : elle était pas de la petite bière, quand même ! Et en avait marre de se faire appeler Arthur, de le voir faire ses ablutions à la mord-moi-l’nœud quand il avait les dents du fond qui baignent. Ah, il ne payait pas de mine ! Et devait souvent montrer patte blanche s’il voulait mettre les gens en coupe réglée.

Alors il voulut éclairer sa lanterne : « Un mec comme moi, ça se trouve pas sous le sabot d’un cheval : me larguer, ça serait une victoire à la Pyrrhus. J’me mets en quatre, pour toi ! C’est pourtant pas la mer à boire, mais toi tu trouves que je brûle la chandelle par les deux bouts, que je suis une tête de linotte, que tout ce que je fais c’est de la roupie de sansonnet. Mais j’te l’dis : j’m’en fous comme de l’an quarante... Et c’est plus la peine de me harceler à tout bout de champ, ou de me faire la course à l’échalote. Je me fais la belle. »

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